Le 8 avril 2019, le gouvernement du Canada a reconnu dans la loi le droit au logement.
Selon les Nations Unies, le droit au logement signifie que tous ont « le droit de vivre en un lieu dans la sécurité, la paix et la dignité ». Il nécessite l’adoption par le gouvernement de politiques et de programmes afin de respecter le droit au logement pour tous dans les meilleurs délais.
Il conviendra aussi d’accorder la priorité aux groupes vulnérables et à ceux dont les besoins sont les plus criants. À l’échelle du Canada, 1,7 million de personnes vivent dans des endroits qui ne sont pas adéquats ou abordables et se trouvent en situation de besoin en matière de logement, et 25 000 Canadiens se trouvent en situation d’itinérance chronique.
Le 14 août 2018, des défenseurs des droits de la personne ont publié une lettre ouverte adressée au premier ministre Trudeau et pressant celui-ci de respecter son engagement à l’égard du droit au logement en inscrivant explicitement ce dernier dans la loi visant la mise en œuvre de la Stratégie nationale sur le logement. Depuis ce temps, une communauté diversifiée de plus de 1 100 personnes et organismes de partout au Canada a donné son appui à cette démarche.
QUI SOMMES-NOUS?
- Leilani Farha, rapporteuse spéciale des Nations Unies sur le droit au logement
- Campagne 2000 : Éliminer la pauvreté des enfants et des familles au Canada
- Amnistie internationale Canada
- Canada sans pauvreté
- Association médicale canadienne
- Association des infirmières et infirmiers du Canada
- Association canadienne d’habitation et de rénovation urbaine
- Alliance canadienne pour mettre fin à l’itinérance
- Centre for Equality Rights in Accommodation
- Lived Experience of Homelessness Network
- ACORN Canada
- Association des femmes autochtones du Canada
- Egale Canada Human Rights Trust
- Plus de 1 100 autres personnes et organismes
NOS REVENDICATIONS :
Le 14 août 2018, nous avons adressé une lettre ouverte au premier ministre Justin Trudeau signée par plus de 170 organismes et éminents Canadiens et pressant celui-ci de respecter son engagement envers le droit au logement en inscrivant explicitement ce dernier dans la loi visant la mise en œuvre de la Stratégie nationale sur le logement.
- L’obligation de rendre compte de la réalisation progressive du droit au logement conformément aux instruments internationaux de protection des droits de la personne (c’est-à-dire non pas simplement l’affirmation d’un engagement gouvernemental).
- Des objectifs, des calendriers et un suivi indépendant conformément aux obligations en matière de droits de la personne (par exemple, non seulement réduire de moitié le nombre de sans-abri d’ici 2030, mais aussi éliminer l’itinérance dans les plus brefs délais).
- Un défenseur du logement indépendant pour évaluer la conformité avec la réalisation progressive du droit au logement (c’est-à-dire qui ferait davantage que rédiger des rapports sur les questions systémiques).
- Une procédure permettant aux groupes concernés de soumettre des pétitions pour identifier les problèmes systémiques et chercher des recours (c’est-à-dire non seulement des consultations avec les groupes concernés, mais aussi un mécanisme de revendication des droits pour une participation et une responsabilisation significatives).
- Le renvoi de questions systémiques sélectives aux fins d’audiences devant un comité des droits de la personne avec la participation des personnes concernées (des audiences accessibles devant un organisme des droits de la personne sont essentielles à une approche fondée sur les droits).
- Une réponse significative du gouvernement aux recommandations non contraignantes en matière de mesures de redressement (c’est-à-dire qu’il ne se limite pas à recevoir des recommandations de politiques, mais qu’il donne suite aux recours en matière de droits de la personne recommandés par un organisme faisant autorité).
- Des initiatives communautaires inclusives fondées sur les droits (c’est-à-dire non seulement les organismes de locataires, mais toutes les collectivités concernées, y compris les sans-abri).
- La cohérence avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (y compris le droit de déterminer et d’élaborer des priorités et des stratégies pour l’exercice du droit au logement).
LE DROIT AU LOGEMENT AU CANADA
Dans le projet de loi C-97 (Loi d’exécution du budget de 2019) déposé le lundi 8 avril, le Canada a fait un grand pas vers l’inscription du droit au logement dans les lois fédérales pour la première fois de son histoire. La Loi relative à la Stratégie nationale sur le logement tient compte de bon nombre de recommandations formulées par les défenseurs du droit au logement. Il faudra toutefois en faire davantage pour s’assurer que des mécanismes de reddition de comptes soient intégrés aux lois.
Les bons coups du gouvernement :
- Un engagement à l’égard de la réalisation progressive du droit à un logement conformément au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
- La nomination d’un défenseur du logement indépendant.
- La constitution d’un Conseil du logement incluant explicitement des personnes ayant vécu en situation d’itinérance ou de logement inadéquat.
- La participation claire et importante de communautés concernées.
Toutefois, nous chercherons à obtenir des amendements afin d’améliorer le projet de loi.
Selon son libellé actuel, la Loi relative à la Stratégie nationale sur le logement proposée omet certains éléments essentiels à un cadre redditionnel réaliste et fondé sur les droits qui permettrait d’assurer l’efficacité de la stratégie sur le logement et de faire en sorte que le Canada soit en conformité avec les normes internationales, notamment :
- L’attribution au Conseil du logement, outre son rôle de conseil, d’un rôle de contrôle afin qu’il assure un suivi des progrès réalisés par rapport aux objectifs de la Stratégie nationale sur le logement;
- L’attribution au défenseur du logement de l’autorité nécessaire pour évaluer la conformité à l’égard de l’engagement envers la concrétisation progressive du droit au logement, notamment grâce à des politiques à des investissements fédéraux, et pour formuler des recommandations dont devra tenir compte le gouvernement;
- L’établissement d’une procédure permettant au défenseur du logement de signaler des problèmes systémiques importants au Tribunal des droits de la personne aux fins d’audiences publiques et de s’assurer ainsi que soient représentés les groupes qui en sont affectés;
- La stipulation explicite d’une exigence selon laquelle les stratégies sur le logement doivent cerner et aborder les obstacles, besoins et droits propres aux peuples autochtones, y compris en secteur urbain, conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
FAQ SUR LE DROIT AU LOGEMENT
Le droit au logement signifie-t-il que le gouvernement devra acheter des maisons pour tout le monde?
Selon les Nations Unies, le droit au logement signifie que tous ont « le droit de vivre en un lieu dans la sécurité, la paix et la dignité ». Cela ne veut pas dire que les gouvernements doivent fournir un logement à tous. Il devra toutefois mettre en place des politiques et des programmes raisonnables pour s’assurer de respecter le droit de chacun au logement dans les meilleurs délais.
Il conviendra aussi d’accorder la priorité aux groupes vulnérables et à ceux dont les besoins sont les plus criants. À l’échelle du Canada, 1,7 million de personnes vivent dans des endroits qui ne sont pas adéquats ou qui sont inabordables.
En quoi cela vient-il en aide aux personnes sans abri ou vivant dans un logement inadéquat ou inabordable?
La reconnaissance du droit au logement est utile à plusieurs égards :
Elle impose au gouvernement fédéral l’obligation de maintenir une stratégie nationale sur le logement (rappelez-vous, le retrait du leadership fédéral en matière de logement a précipité la crise du logement au Canada).
- Elle nécessite l’adoption par le gouvernement de politiques et de programmes afin de respecter le droit au logement pour tous dans les meilleurs délais.
- Elle signifie aussi que les politiques sur le logement doivent accorder la priorité aux groupes vulnérables et à ceux dont les besoins sont les plus criants.
- Elle donne aux groupes concernés une voix et un rôle dans le processus politique, de même qu’un recours en cas de violation de leur droit.
- Elle crée une responsabilité et une surveillance indépendante en ce qui concerne la Stratégie nationale sur le logement.
Quelle est la signification du logement adéquat?
Le logement « adéquat » signifie davantage que quatre murs et un toit. En somme, le droit au logement permet à chacun de vivre dans la sécurité, la paix et la dignité. Les Nations Unies ont aussi déclaré que plusieurs conditions doivent être satisfaites pour qu’un logement soit jugé adéquat.
- L’existence de services, matériels, installations et infrastructures : eau potable, installations d’assainissement suffisantes et chauffage abordable.
- La sécurité d’occupation : y compris une protection juridique contre les expulsions forcées, le harcèlement et d’autres menaces.
- La capacité de paiement : un logement n’est pas convenable si son coût menace ou compromet l’exercice, par ses occupants, d’autres droits fondamentaux.
- L’habitabilité : le logement doit offrir à ses occupants un milieu sûr, sans danger pour la santé et sécuritaire.
- L’accessibilité : le logement doit prendre en compte les besoins particuliers des groupes défavorisés et marginalisés, y compris les personnes vivant avec quelque forme d’incapacité que ce soit.
- L’emplacement : le logement doit être situé à proximité de possibilités d’emploi, d’écoles, de services de santé et de services sociaux.
- Le respect du milieu culturel : le logement doit respecter l’identité culturelle des occupants et en tenir compte.
Quels devraient être les coûts et les économies associés à la reconnaissance dans la loi du droit au logement?
- Coûts de l’itinérance par rapport à ceux du logement.
- L’itinérance coûte chaque année 7 milliards de dollars à l’économie canadienne.
- Avantages de la réduction des inégalités sociales (en anglais) (p. ex. comme indiqué par Pickett & Wilkinson dans le livre The Spirit Level)
D’autres pays ont-ils reconnu dans leurs lois le droit au logement?
La plupart des pays reconnaissent le droit au logement. Bon nombre d’entre eux le reconnaissent à titre de droit constitutionnel ou dans le cadre de la législation, tandis que dans d’autres, on le reconnaît à titre de composante du droit à la vie. Voici certains des pays dans lesquels le droit au logement est un droit constitutionnel :
- Argentine, Bangladesh, Belgique, Brésil Burkina Faso, Colombie, Costa Rica, République dominicaine, Équateur, Salvador, Finlande, Guatemala, Guyane, Haïti, Honduras, Maldives, Mali, Mexique, Népal, Pays-Bas, Nicaragua, Nigéria, Pakistan, Panama, Paraguay, Pérou, Philippines, Portugal, Pologne, République de Corée, Russie, Seychelles, Afrique du Sud, Espagne, Sri Lanka, Suède, Suisse, Turquie, Uruguay, Vietnam, Sri Lanka.
Pourquoi devons-nous reconnaître le droit au logement dans les lois canadiennes?
La reconnaissance du droit au logement revêt de l’importance pour plusieurs raisons :
- Le défaut du Canada de reconnaître le droit au logement a suscité une crise du logement au cours des 30 dernières années.
- À l’échelle du Canada, 1,7 million de personnes vivent dans des endroits qui ne sont pas adéquats ou qui sont inabordables et se trouvent en situation de besoin en matière de logement, et 25 000 autres personnes se trouvent en situation d’itinérance chronique.
- Chaque nuit, 35 000 Canadiens sont sans abri et au moins 235 000 personnes se trouvent en situation d’itinérance au cours d’une année. Au Canada, l’itinérance massive est née dans les années 1980, à la suite du désinvestissement dans le logement abordable, des changements structurels dans l’économie et de la réduction des dépenses dans les programmes de soutien social.
- L’itinérance nous coûte chaque année jusqu’à 7 milliards de dollars – sans que l’on s’attaque aux causes profondes des dépenses d’urgence. Il en coûterait bien moins d’offrir du logement et des services sociaux.
- L’itinérance et le logement inadéquat touchent de manière disproportionnée les personnes atteintes d’une incapacité, les ménages dont une femme est chef de famille et les membres des communautés racialisées et immigrantes.
- De 28 à 34 pour cent de la population des refuges est autochtone, une disproportion remarquable compte tenu du fait que les peuples autochtones représentent 4,3 pour cent de la population canadienne.
- Chaque nuit, au Canada, 3 491 femmes et leurs 2 724 enfants dorment dans des refuges pour des raisons de violence conjugale.